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Engagement patriotique. Le journaliste-écrivain n’est une fois de plus pas resté silencieux et inactif suite au drame qu’a vécu la Côte d’Ivoire, particulièrement la ville historique de Bassam, avec les attentats terroristes  du 13 mars. Armé de sa plume, l’écrivain à succès a accouché d’un superbe texte, poétiquement beau, qu’il a mis en chanson avec l’arrangeur Freddy Assogba, interprétée par Kandice et Odee. La chanson intitulée « Bassam » qu’il considère comme sa « contribution » à l’hommage aux victimes et son soutien aux populations traumatisées est disponible en téléchargement et le clip visible sur youtube. Serge Bilé était à Abidjan le week-end dernier pour promouvoir le projet et aller se recueillir sur les lieux du drame. Après quoi, il a répondu à nos questions.

 

Qu’est-ce qui sous-tend  cet autre engagement que vous manifestez ici encore à l’écriture de cette chanson, « Bassam » en hommage aux victimes des attentats du 13 mars ?

C’est un texte sur ce qui s’est passé le 13 mars.  L’idée, c’était de retracer un peu le fil de la journée et faire en sorte qu’à travers l’interprétation des chanteuses, on puisse avoir un hommage aux victimes et un soutien aux populations par rapport aux épreuves que ça peut supposer. Je reviens  de Bassam (interview réalisée le dimanche 3 avril, ndlr), on a vu qu’il y encore beaucoup de gens qui sont très traumatisés par ce qui s’est passé et qui ont du mal a retrouver une sérénité par rapport à ça. Il était important de montrer qu’on a un soutien réel à toutes ces personnes-là et aussi une pensée pour les victimes de ce drame.

 

Est-ce que les mots sont venus facilement à l’écriture de cette chanson ?

C’est toujours si simple quand on ressent les choses fortement !  Le texte, il vient de lui-même ! C’est le refrain qui a servi d’architecture à tout. Il dit : « je chéris la mémoire des fleurs qui sont tombées. Je suis la Côte d’Ivoire (puisque nous le sommes tous). Mon nom c’est résister ». L’idée c’est de montrer qu’effectivement on avait le souvenir et l’envie de continuer à vivre. Une fois que le refrain était là, tout le reste est venu tout seul et en quelques minutes c’était fait. J’ai écris le texte ainsi. Et j’ai appelé ensuite Freddy Assogba pour faire la musique  et  le faire interpréter par une chanteuse. Au départ c’était une chanteuse que je voulais.   Parce que c’est un texte plus poétique. J’ai cherché de mon côté, il a cherché une autre de son coté et comme on s’est finalement retrouvé avec  deux chanteuses, on s’est dit autant faire un duo. C’est comme ça que Kandice et Odee sont venues interpréter cette chanson. Chacune avait la vraie volonté de vouloir participer à ce projet et ce n’est pas plus mal.

 

Hier c’était « Nou La Epi Zot » (Nous sommes avec vous) en 2003, au début de la guerre, aujourd’hui c’est « Bassam ». Vous êtes dans votre logique de consolateur, d’apaiser les âmes en chanson…

Oui, c’était important d’apporter notre soutien aux populations ivoiriennes qui traversaient des moments difficiles pendant la guerre. Ma démarche, ce n’est pas tant les clans politiques  des uns et des autres. C’est surtout la population. Parce qu’on se soucie rarement d’elle quand il y a des guerres, des attentats. Et l’idée, c’est de dire que l’on soit ici ou à l’étranger, on compatit à cette souffrance-là, c’est la première chose. la seconde, c’est  quand j’ai l’opportunité d’apporter un soutien public, je ne peux m’empêcher  de l’exprimer à travers une chanson  qui puisse montrer qu’on est attaché à tout ce qui se passe ici.

 

Qu’est-ce que vous gagnez dans tout ça ?

Je ne gagne rien ! J’investis dedans.  Je suis arrivé à un stade où je vis bien de mon travail en Martinique où j’habite. Et si je sens que quelque me touche à cœur, je peux me permettre de faire quelque chose. Voilà, c’est un attachement personnel que je manifeste à ma façon.

 

Alors en France, comment avez-vous  réagi à la suite des attentats de Charlie Hebdo ?

 Pour Charlie, on ne m’a pas attendu pour faire quoi que ce soit !  Bien sûr que je suis Charlie, oui !  Je suis d’ailleurs  pour toutes les libertés. La question n’est pas là parce que comme je l’explique plus souvent, j’ai quitté la Côte d’ivoire en 1973, j’avais 13 ans et en France on est habitué aux attentats. Charlie, ce n’est pas le premier attentat. Je me souviens  que j’ai entendu parler d’un des premiers attentats dans les années 70 donc on est confronté à ça. Je n’ai pas envie de dire qu’on s’y attend.  Mais pour la Côte d’Ivoire, c’est la première fois. Et personnellement je suis encore plus choqué parce que c’est la première fois. J’imagine que la première fois qu’il y a eu les premiers attentats en France, les Français devaient être plus choqués aussi! Comme tous les Ivoiriens pour cette première fois, je suis extrêmement choqué c’est pourquoi j’ai cette réaction là ; voilà. La question c’est de savoir si nous devons nous laisser intimider par ce genre de barbarie ou pas, voilà ! Personnellement, je dis non ! C’est pour ça qu’on fait des chansons, et dans celle-ci je dis « Je suis la Côte d’Ivoire, mon nom c’est résister. »

 

Avec tout ce qu’on connait aujourd’hui comme menace terroriste en France, est-ce que vous avez peur quand vous y êtes ?

 

Non, absolument pas. Avoir peur de quoi ?

 

Comment vous percevez cette menace alors ?

Comme je le disais, la question de savoir est-ce qu’on doit arrêter de vivre comme avant ou le contraire ! Et moi je n’ai pas peur et je vis comme avant. Et puis comme on ne sait rien, peut-être que là où nous sommes (Ndlr : hypermarché Sococé), il peut y avoir une bombe quelque part, mais on continue de vivre ! Je reviens de Bassam et je suis très fier de ce que j’ai vu !  Les enfants qui font du cheval sur la plage où les attentats se sont passés ! Je suis allés voir dans les petites paillottes là où on a tiré, j’ai été aussi dans le cercle de Reggae où ça a démarré, voilà) je suis allés tout voir et je suis heureux de voir que les populations continuent à vivre ! A Bassam ou à paris, il faut continuer à vivre et espérer que nos autorités, que ce soit ici où ailleurs, fassent leur travail pour assurer la sécurité des populations.

 

 

Pour vous, est-ce que le terrorisme est une fatalité ou pensez vous que les Etats, ensemble, arriveront à bout de cette menace ?

Vous savez, si moi j’avais la capacité de pouvoir deviner ce que sera l’avenir, à la rigueur, on ne serait même pas là ! Personne ne sait ! Qui pouvait s’imaginer qu’un jour, Daesh serait créé ? Voilà aujourd’hui, il y a des obscurantistes, il y a des personnes qui voudraient nous ramener à des années lumières en arrière, voilà, on n’accepte pas et il faut résister à ça ! Maintenant, est-ce que c’est une fatalité, je n’en sais rien, tout ce que je sais c’est qu’il ne faut pas l’accepter !

 

Quel est le circuit de diffusion ou de  distribution de « Bassam » ?

L’idée au départ c’était de faire une chanson, de faire un clip - et là je tiens à rendre hommage à tous mes amis martiniquais qui ont travaillé sur ce projet, notamment sur le clip. Ils sont quatre monteurs Martiniquais à avoir travaillé dessus : deux infographistes qui ont recherché les images, qui ont fait le montage. L’idée c’est de diffuser ça gratuitement. C’est ça le but. Et donc le clip sera diffusé à la RTI à partie de demain (lundi 4 avril, ndlr) ainsi, n’importe quel ivoirien où il se trouve dans le monde pourra y accéder. Maintenant, je sais que de temps en temps aujourd’hui il y a quelques personnes qui voudraient avoir des téléchargements, donc nous avons demandé à une agence sur Paris de pouvoir le proposer pour cela. Et j’ai donné mes droits aux deux chanteuses en disant que si d’aventure ça générait des droits, elles les récupéreraient pour en faire ce qu’elles veulent, voilà.

 

Apres cette chanson, est-ce qu’il y a un autre projet derrière ?

Non, moi je voulais juste apporter ma contribution ponctuelle là. Je suis occupé dans beaucoup d’autres choses notamment dans des livres qui doivent sortir. Là, je me suis dis qu’il fallait que je vienne voir ce qui se passe, pour avoir moins d’anxiété par rapport aux parents ici. « Bassam », c’est ma contribution et à partir de là je retourne faire autre chose.

 

Propos recueillis par R. Konan

 

 

Le texte de la chanson

 JE SUIS LA CÔTE D\'IVOIRE

 

 

COUPLET 1

Si Bassam pouvait parler

Elle dirait que ce jour-là

Elle s\'était endimanchée

Comme si c\'était l\'abissa

La mer, le soleil, le vent

La journée s\'annonçait bien

Il fallait voir les enfants

S\'amuser de loin en loin

 

 

COUPLET 2

Si Bassam pouvait parler

Elle dirait que sans prév\'nir

Le ciel plus tard s\'est voilé

Plus un mot et plus un rire

La mer, la panique, les cris

De la foule qui fuit le diable

Et l\'horreur pour toutes ces vies

Éparpillées sur le sable

 

 

REFRAIN

Je chéris la mémoire

Des fleurs qui sont tombées

Je suis la Côte d\'Ivoire

Mon nom c\'est résister

 

 

COUPLET 3

Si Bassam pouvait parler

Elle dirait tout son dégout

Des salauds qui l\'ont souillée

De ce siècle devenu fou

La mort, la peine, la douleur

La terre n\'est plus que violence

Mais pas question que la peur

L\'emporte sur l\'innocence

 

 

REFRAIN

Je chéris la mémoire

Des fleurs qui sont tombées

Je suis la Côte d\'Ivoire

Mon nom c\'est résister

 

 

PONT

C\'est à nous les vivants

De dire encore au monde

Que jamais l\'éléphant

Ne cède aux armes qui grondent

 

C\'est à nous les vivants

De dire encore au monde

Que jamais l\'éléphant

Ne cède aux armes qui grondent

 

 

REFRAIN

Je chéris la mémoire

Des fleurs qui sont tombées

Je suis la Côte d\'Ivoire

 

Mon nom c\'est résister