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Un litige foncier sur le site « Malbert V2 » à Akoupé-Zeudji a viré au drame, avec la mort d’un homme lors d’une intervention de la gendarmerie, sur fond de tensions autour d’une expropriation dénoncée par les populations. Selon les témoignages recueillis, un peloton de gendarmes lourdement armés a escorté des bulldozers venus raser des habitations et des cultures sur un terrain de plus de 60 hectares.

Ces terres auraient été vendues à des ressortissants chinois par l’opérateur immobilier Touré Ahmed Bouah malgré une décision de justice favorable aux acquéreurs initiaux. Le vendredi 18 juillet 2025, les travaux ont démarré sous protection militaire. Les habitants affirment avoir investi des dizaines de millions de FCFA dans la construction de leurs maisons.

« Nous avons gagné le procès mais Touré Ahmed Bouah et le Fonds de prévoyance militaire (Fpm) n’en tiennent pas compte », s’indigne un représentant des victimes. Le 2 août dernier, la tension a culminé : les forces de l’ordre seraient revenues avec l'appui de civils armés. Lors des affrontements, un jeune Burkinabè, Aziz Binfinbou, récemment marié, a été mortellement touché. « Pourquoi tuer quelqu’un pour des terrains achetés légalement ? », questionnent les habitants.

Ces derniers dénoncent un « passage en force » et accusent Touré Ahmed Bouah d’agir sous la protection d’une haute personnalité du pays. Ils pointent également du doigt un contrat de plus de 60 milliards FCFA avec des Chinois dont une partie des fonds aurait dû revenir au village, sans jamais leur être versée. Le chef du village, Jean Agbo et plusieurs notables ont été retenus au commandement supérieur de la gendarmerie pendant plus de 14 heures, accusés de bloquer le projet. Sous pression, ils auraient été contraints d’accepter les travaux malgré l’opposition générale du village.

Face à ce qu’ils considèrent comme une injustice flagrante et une violation des décisions judiciaires, les habitants lancent un appel au président Alassane Ouattara pour faire respecter leurs droits. « Nous avons tous les documents. Qu’on nous rende nos terres ! ». Un autre habitant acquéreur très remonté du fait que Touré Ahmed Bouah les présente comme des squatteurs, est revenu sur les faits.

Selon lui, initialement prévu pour le 17 juillet 2025, un procès opposant les habitants à l’entreprise chinoise, a été reporté au 27 octobre. Pourtant, dès le 18 juillet, l’entreprise a lancé des opérations de décapage sur le site en litige, sans présenter de décision de justice. Les habitants signalent que 78 des personnes assignées n’avaient jamais été notifiées, et un jugement par défaut n’aurait couvert que 50 hectares. Or, plus de 100 hectares ont été décapés, suscitant l’indignation locale. Face à la progression des travaux, et alors que plusieurs familles dorment encore dans la rue, les riverains ont décidé de résister.

Le 5 août, ils ont à leur tour assigné l’entreprise en justice. L’entreprise n’a pas répondu à l’audience et un jugement favorable a été rendu aux habitants. Un huissier a tenté de notifier la décision alors que de nouvelles démolitions étaient en cours. Depuis, malgré la notification, l’entreprise refuse de quitter les lieux. La situation a dégénéré : des hommes, des femmes et enfants se sont interposés à mains nues. Un manifestant a été blessé par balle tirée à bout portant par les forces de l’ordre.    

Le Président-directeur général de Sophia SA, Touré Ahmed Bouah, nie toute implication dans l’incident du samedi 2 août 2025, intervenu sur le site  des 541 ha d’Akoupé-Zeudji, lors des travaux de déguerpissement, de démolition et de terrassement engagés par les investisseurs chinois. Dans un communiqué signé, lundi, de son conseiller spécial chargé de la communication, Camille Battey, et relayé par l’Agence ivoirienne de presse, M. Touré a tenu à rappeler « qu’il n’est pas acteur sur le terrain, ni impliqué dans la gestion opérationnelle de ces déguerpissements ». 

A. Coulibaly