Contribution / Téléphonie mobile en Côte d’Ivoire : les manœuvres dolosives des sociétés de télécommunications mobiles
Selon le dicton, "le client est toujours roi". Loin des amphithéâtres de sciences économiques où l’on développe les "théories marketing’’ « cette notion reste vide de sens dans l'environnement pour lequel elle a été élaborée ».
De quoi s'agit-il ?
Pour mieux cerner le contour de notre article, il conviendra de définir les termes "sociétés de télécommunications mobiles en Côte d'Ivoire" et "consommateurs".
Sont désignés comme étant sociétés de télécommunications mobiles l'ensemble des corporations offrant des services dans le cadre de la télécommunication mobile. Nous pouvons citer entre autres la société "Orange CI" (nous y reviendrons).
Quant à la notion de consommateurs, elle reste difficile à définir car polysémique. Retenons dans le cadre de notre étude que cette notion dans le rapport sociétés de télécommunications mobiles et consommateurs peut être renvoyée à celle d'abonné. Il s'agit de l'ensemble des usagers des services des sociétés de télécommunications mobiles.
Il est indispensable de comprendre et d'accepter le déséquilibre de fait qui naît des rapports entre sociétés de télécommunications mobiles et leurs abonnés, en raison de la taille financière et de la forme juridique de la première citée. Nous pouvons compter sur le Droit pour rétablir ce ‘‘déséquilibre’’.
Toutefois, le mépris et l'usage des manœuvres entraînant un vice de consentement qui ne profite qu'à ces sociétés doivent être dénoncés avec la dernière énergie.
Il serait difficile voire impossible de se prononcer sur un tel sujet sans s'y mettre avec les émotions, tant les abus sont fréquents. Il (ce sujet) ne manque pas alors d’intérêts. Nous nous efforcerons à travers une analyse déductive de situer les responsabilités et décrier les manquements de ces vampires géants qui ne font que s'abreuver illégalement à la bourse tarissable de leurs clientèles.
Se poser les bonnes questions nous aiderons à obtenir les bonnes réponses sinon des pistes de solutions.
De ce fait, quelle est la nature des rapports existant entre les sociétés de communications mobiles et leurs abonnés ?
Dans cet Etat de droit garantissant le respect des droits des citoyens les plus élémentaires, quel est le rôle des entités régulatrices gage de l'établissement d'un équilibre illusoire ?
Cette réflexion se mènera en présentant la nature du rapport des deux cocontractants (I) qui trouvera sa justification dans l'inertie et l'inaction des instances régulatrices(II).
I/ LES RAPPORTS ENTRE LES SOCIETES DE TELECOMMUNICATIONS MOBILES ET LEURS ABONNÉS : UNE RELATION EMPREINTE DE DESEQUILIBRE, DE MEPRIS, ET DE VIOLATION DE LA LÉGISLATION EN MATIERE CONTRACTUELLE.
Mépriser le consommateur en raison du déséquilibre flagrant issu d'une relation contractuelle devrait cesser à cette ère.
Les faits que l'on peut citer à titre d'illustrations foisonnent.
Nous en ferons l'économie pour ne relater que l'un des abus les plus pertinents mais aussi et surtout le plus récent.
Les faits :
Le 1er novembre de l'année 2019, Le dénommé L. P. F. reçoit un message de Orange Ci formulé en ces termes:
« Vos contacts ont été sauvegardés à 103F. Récupérez-les gratuitement en cas de perte. Pour vous désabonner, envoyez STOP par SMS au 7956 ».
Comme vous et moi, le sieur LPF constata du regard, impuissamment l'une des arnaques du siècle.
Le service client joint, présente en plus de l'arnaque son manque de courtoisie et sa prédisposition à mépriser l'abonné. Ensuite, l'agent essaie tant bien que mal d'argumenter mais parvient difficilement à convaincre la victime. Poursuivant, il conclut que : « le service ayant entraîné la facturation a été activé par défaut et la victime pourrait souscrire si elle l'entendait ».
En règle générale, c'est la rencontre de l'offre et de la demande qui aboutit à la conclusion d'un contrat donné. Mais aussi et surtout, l'autonomie de la volonté constitue le principe en la matière.
Comment un service payant peut-il être considéré par défaut ?
Ne s'agit-il pas d'un vice de consentement permettant à cette multinationale de se faire illégalement une fortune ?
Faisons un calcul mental:
Considérons les données suivantes :
Un million d'abonnés facturés par ORANGE CI à hauteur de 103 frs pour un service d'une utilité méconnue. Figurez-vous, 2 fois par mois.
Résultat : plus de 200 millions recueillis de manière illégale des poches du consommateur.
Sachez que les données ont été estimées au minimum.
Ces forfaitures sont récurrentes et de tout genre.
La protection de la partie faible est, elle encore le leitmotiv des instances régulatrices du domaine des télécommunications mobiles ?
II/ L'INACTION DES AUTORITÉS DE REGULATION : UN SILENCE JUGÉ COUPABLE.
Entendons par autorités de régulation, l’ensemble des organisations étatiques (A) ou non (B) ayant pour mission l'éradication des abus dans le domaine de la télécommunication mobile.
A/ L'INERTIE DE L'ARTCI
Dans le cadre de l’exécution de sa mission de contrôle de la Qualité des Services de télécommunications telle que définie dans l’ordonnance 2012-293 du 21 mars 2012 relative aux Télécommunications et aux Technologies de l’Information et de la Communication, l’Autorité de Régulation des Télécommunications de Côte d’Ivoire (ARTCI) a effectué des opérations de contrôles inopinés de la qualité de service (QoS) des réseaux de téléphonie mobile dans plusieurs localités reparties sur toute l’étendue du territoire national.
Ces opérations de contrôles inopinées ont pour objectif principal d’auditer, à l’insu des opérateurs, la qualité des principaux services de téléphonie à savoir :
- Le service de téléphonie (voix)
- Le service d’accès à internet (DATA)
- Le service SMS
- Le service à la clientèle (Centre d’appel)
- La facturation des services
S’agit-il de contrôles de façades ? Sinon comment assister à la violation du droit du consommateur sans agir, à fortiori sans en sanctionner les auteurs ? Sont-elles au-dessus de la loi ? Sont-elles en droit d'enfreindre les principes classiques vieux de leur existence dans l'impunité ? Quel rôle jouent les associations de consommateurs pour éviter de tels forfaitures?
B/ LES ASSOCIATIONS DE CONSOMMATEURS
C'est le lieu d'interpeller l'ensemble des organisations s'exprimant au nom des consommateurs sur cette pratique DOLOSIVE si ce n'est déjà fait.
Il est vrai que les ONG et autres associations de consommateurs intervenants en Afrique peinent à atteindre leurs objectifs en raison de leurs faibles expériences et de la non implication du consommateur victime ou non.
Le montant de 103frs cfa débité frauduleusement du compte d'un consommateur semble insignifiant mais en réalité c'est une bagatelle si le mécanisme dolosif est répété sur un nombre significatif de consommateurs.
Lacina PEHON COULIBALY, doctorant des sciences juridiques.
-Consultant-juriste
-Doctorant en droit privé-droit des affaires
-Manager général (Dreams-International)