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C'est un ingrédient qui peut à tout moment mettre le feu aux poudres. Dans le village d'Elokato, 33 propriétaires terriens, lésés dans la gestion de leur patrimoine foncier, entendent recourir à tous les moyens pour faire respecter leurs droits de propriété. Dans cette logique, ils ont donc saisi la justice et dans l'attente du verdict, n'écartent pas de recourir à d'autres actions, sans doute musclées. De quoi s'agit-il ?

A leur insu, ces propriétaires terriens, qui revendiquent un droit sur près de 130 hectares de parcelles dans le village d'Elokato, dans la sous-préfecture de Bingerville, apprennent en 2019, qu'un processus de mise en vente de leurs terres a été enclenché par la chefferie du village. La chefferie a donc introduit un dossier de demande d'Attstation de cession définitive (ACD) de 300 ha de parcelles villageoises auprès du ministère de la Construction et obtenu gain de cause, au mépris d'une nouvelle disposition règlementaire qui voudrait que de telles démarches soient désormais dévolues à des opérateurs agréés, quand les parcelles sont importantes. Et, c'est justement lorsque la société Wenincy Group et la Fondation Wenincy, les opérateurs auxquels ces propriétaires terriens ont décidé de céder leurs domaines, se rendent au ministère de la Construction, pour obtenir les ACD nécessaires à la réalisation de leurs projets immobiliers, qu'ils découvrent que les parcelles qu'ils veulent acquérir, font déjà l'objet d'un autre dossier dans les registres dudit ministère. La société Wenincy Group et la Fondation Wenincy font réaliser une levée topographique qui confirme que les parcelles de 130 ha en question, font l’objet d’ACD déjà délivrés par le ministère de la Construction.

Plus l’ombre d’un doute. Ils informent par conséquent les propriétaires des parcelles qui, à leur tour, mènent les investigations nécessaires et se rendent compte que les documents utilisés pour la demande d'ACD sont manifestement de faux, puisqu'ils portent la signature du chef d'Elokato, décédé en 2018.

Quand les 33 propriétaires terriens et leurs opérateurs immobiliers prennent attache avec la chefferie de leur village pour trouver une issue négociée à l'affaire, ils font face à une intransigeance des autorités coutumières du village. Elles posent deux conditions à toutes discussions :  que les propriétaires terriens lésés prennent attache avec les opérateurs immobiliers ayant introduit le dossier du premier ACD et s'engager à verser à la chefferie une quote-part de 30% des transactions. Refus des propriétaires terriens, qui se retrouveraient alors à céder leurs patrimoines fonciers à pertes, dans la mesure où ils devront par la suite faire du 50-50 avec leurs propres opérateurs.

Ainsi, ils assistent impuissants au décapage et à la mise en vente de leurs parcelles par des opérateurs choisis par la chefferie alors même qu’ils ne les ont jamais cédées, n’ont jamais signé de convention avec ces opérateurs, notamment les sociétés RIA et CIFIAP ni donné leur accord pour toute autre exploitation ou transaction. Face à la tournure que prend l'affaire, le Conseil d'Etat a donc été saisi pour trancher le litige.

Ce qui révolte les propriétaires terriens, c'est le fait qu'ils sont nargués au quotidien. Selon leurs adversaires, leur saisine de la justice est une pure perte de temps. Interrogée sur ce litige, la chefferie d’Elokato explique que « le groupe Weninci est arrivé dans notre village pour faire un lotissement. Malheureusement, ses responsables n'ont pas pris attache avec les personnes ressources. Parmi les 33 personnes dont on parle, il n'y a qu'un seul chef de famille dans le lot. Toutes les autres personnes n'ont aucun droit coutumier sur les terres mises à la disposition du Group ». Puis d’ajouter qu’ils ont fait « un recensement de tous les opérateurs qui ont travaillé sur l'aire géographique de Elokato. Nous avons recensé 129 opérateurs. Après épluchement des dossiers, seulement 4 respectaient les normes. Weninci Group faisait partie de ces opérateurs qui ont travaillé et qui n'ont obtenu aucune attestation de la chefferie. Nous avons écrit courant juillet 2021 au Group pour lui signifier que le dossier qu'il a adressé au village n'est pas bon parce qu'il n'a pas travaillé avec les personnes ressources. Donc, weninci est informé depuis juillet 2021, qu'il n'a pas travaillé dans les normes ».

Des propos que réfute le porte-parole des 33 propriétaires terriens. « C'est un gros mensonge. S'il n'y avait pas de manœuvres pour nous spolier, pensez-vous que nous serions allés saisir la justice, avec les dépenses que cela induit ? Que la chefferie sache que nous n'allons pas nous laisser déposséder de nos terres sans rien faire », riposte le porte-parole.

Au regard de la tension palpable entre les différents protagonistes, il n’est pas à écarter qu’ils en viennent à se mesurer dans les prochains jours.

A.K.