Côte d’Ivoire / Déguerpissement dans la forêt du Téné à Oumé : Plusieurs maisons incendiées, des producteurs tabassés
Ils vivent désormais sous les décombres, eux ce sont les vaillants producteurs de café et de cacao, de Simonkro, localité située dans la sous-préfecture d’Oumé. Ces bras valides qui participaient depuis plusieurs années à la production nationale de cacao et leurs progénitures ont été tabassés sans ménagement et sans pitié, par des hommes en armes, samedi dernier. Il était 11 heures 13 minutes, quand nous arrivons sur les lieux du déguerpissement. C’est une localité complètement balafrée, qui se présente à nous. Maisons incendiées, sacs de cacao partis en fumée, vêtements et autres ustensiles de cuisine calcinés, plantent le triste décor à Simonkro. Mille cent vingt trois (1123), producteurs de cacao et leurs familles ont été chassés de leurs habitats, par les éléments des Forces républicaines de Côte d’Ivoire (FRCI) à la demande du commandant des eaux et forêts de la zone de Téné, le capitaine Nioh C. Koné, qui selon notre source, aurait reçu l’ordre de sa hiérarchie pour déguerpir les producteurs du binôme ivoirien. Désormais, les producteurs de Café-cacao, sont livrés à eux-mêmes. Sans abri, les planteurs dorment dans des champs après de durs labeurs. Ces individus sinistrés confient leur sort à Dieu. Kouakou Kouamé Fernand, tenancier de la boutique du village, crie son ras-le bol : « Les agents des eaux et forêts, les gendarmes et les Frci nous ont tabassés. Les villageois ont été réveillés avec des kalachnikovs. Les militaires ont pillé ma boutique, vidé mes sacs de riz par terre, et ils m’ont même ordonné de brûler ma moto. C’était l’enfer chez nous ». A la présidente des femmes de Simonkro d’ajouter : « les militaires nous ont traumatisés. Au moment où, on faisait sortir nos affaires de nos maisons, les bulldozersprocédaient encore à des casses. Nous les femmes ne faisions que demander pardon aux militaires qui frappaient nos époux. L’argent de notre association que je gardais, ceux qui sont venus, nous déguerpir, m’ont brutalisé et ont pris », a-t-elle déploré. Au moment, où nous quittions les lieux, les parents étaient sans nouvelles des enfants qui, pris de panique lors de l’opération, se sont sauvés dans la nature. C’est la psychose qui continue de gagner du terrain dans la zone de Téné.
E.K envoyé spécial dans le Téné.
Yao Kouadio Gilbert (président des jeunes de Simonkro)
« C’était vraiment terrible pour nous »
« Tôt le matin, aux environs de 6 heures du matin, les responsables de la Sodefor, sont venus avec un cargo de gendarmes et des éléments des FRCI. Ils ont pris le campement en otage. Ils nous ont ordonné de sortir de nos maisons, et de ramasser nos bagages. Sans opposition, nous nous sommes exécutés. Au moment où, nous sortions nos affaires pour les mettre sur la place publique du village, les hommes en treillis, les brûlaient avec des bidons d’essence, qu’ils tenaient en main. Ils nous ont tabassés. Pendant leur opération, aucun villageois, n’avait le droit de communiquer au téléphone. Les soldats nous ont dépouillés de nos fusils de chasse, de nos machettes de champ, de nos téléphones portables et de notre argent. Avant de pilier les sacs de riz, de la boutique de mon frère. Les soldats surexcités ont bu, toute la boisson dans cette buvette. Une jeune fille, qui avait accouché, il y a seulement cinq (5) jours, était obligée de fuir pour se refugier sous les cacaoyers, afin de trouver un abri. Vraiment c’était terrible pour nous. Cette opération de déguerpissement a duré de 6 heures du matin à 16 heures dans l’après midi ».
Kouamé Sangoh (chef de Simonkro)
« Les militaires nous ont humiliés …»
C’est l’ex-directeur général de la Sodefor, Soundelé Konan, qui a cédé les terres à feu Nanan Yao Simon, alors chef du village de Yamoussoukro, qui a fondé ce campement. Aujourd’hui, cela fait 43 ans que nous vivons ici. Récemment, avec le sous-préfet d’Oumé, et le commandant du cantonnement des eaux et forêts de la zone, nous avons organisé une fête, sur notre place publique. Ces autorités nous ont encouragés pour notre contribution à la production du Café et du Cacao. Tout en nous affirmant que personne ne viendra nous chasser d’ici. Voici qu’à notre grande surprise, on vient nous déguerpir. Les militaires nous ont humiliés. Nous sommes présentement sans abri. Ce sont au total, mille cent vingt trois personnes jetées dans la brousse et sous les cacaoyers.
Propos recueillis par E.K