Côte d’Ivoire / Guerre de succession des Akoué à Yamoussoukro: Le document de justice qui trahit le camp Dahouet
La guerre pour la succession à la chefferie des Akoué de Yamoussoukro n’en finira pas avec les rebondissements. Le dernier acte en date de ce long marathon, la révélation d’une décision de justice rendue, le 14 juin 1974, sous le numéro 66 par le Tribunal de première instance de Bouaké présidé par Abaka Robert, le substitut du Procureur de la République, Tia Koné et le Greffier Gnamba Emmanuel. A l’origine de cette décision, une requête introduite par dame Monique Dahouet, mère de Nanan Augustin Dahouet, aux fins de changer sa date de naissance de 1940 et en 1937 et son patronyme Monique Dahouet en Monique Houphouët-Boigny. Chose qu’elle a obtenue sans difficulté et sans témoin. Mais chose aussi qui met en doute sa filiation, laissant apparaître plusieurs questions. Suffit-il de déclarer, seule, sans autres témoins de notoriété ou de moralité, que l’on est la fille de quelqu’un pour être déclarée comme telle ? On se serait attendu à une enquête de moralité sur Mme Monique Dahouet pour savoir si l’on pouvait porter foi à ses déclarations. On se serait également attendu à une enquête de notoriété pour savoir qui d’autre que Mme Monique Dahouet, en tout cas contemporain de son prétendu père, disait la même chose qu’elle à savoir qu’elle est bien la fille d’Augustin Houphouët. Suffit-il de produire un certificat médical pour voir son âge corrigé et augmenté de trois ans ? Mme Dahouet déclare qu’elle est née Houphouët-Boigny. Son prétendu père n’ayant lui-même jamais porté le nom Houphouët-Boigny qui a été inventé par Félix Houphouët-Boigny en 1946. A supposer qu’il soit bien son père, comment donc aurait-il pu la déclarer sous un nom qui n’existait pas ? Et qui plus est, quand Monique Amlan (Dahouet) fait son apparition dans la Cour de Félix Houphouët-Boigny en 1951, le frère de ce dernier est décédé depuis au moins quatorze ans. Ci-dessous la décision du juge de Bouaké.
REPUBLIQUE DE COTE D’IVOIRE COUR D’APPEL D’ABIDJAN TRIBUNAL DE PREMIERE INSTANCE DE BOUAKE
N° 66 /
JUGEMENT SUR REQUETE D’HOMOLOGATION ET D’ADJONCTION DE NOM PATRONYMIQUE DE RECTIFICATION D’AGE ET D’ORTHOGRAPHE DE NOM DE :
HOUPHOUET BOIGNY Monique
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EXTRAIT DES MINUTES DU GREFFE DU TRIBUNAL DE PREMIERE INSTANCE DE BOUAKE
AUDIENCE ORDINAIRE DU VENDREDI 14 JUIN 1974 Le tribunal de première instance de Bouaké (Côte d’Ivoire), statuant en matière civile, en son audience tenue en chambre du conseil, le Monsieur ABAKA Robert, président, En présence de monsieur TIA KONE, substitut du procureur de la République, Avec l’assistance de maître GNAMBA Gouédji Emmanuel, greffier, A rendu le jugement dont la teneur suit : POINT DE FAIT Par la déclaration faite le 25 octobre 1972 devant l’officier de l’état-civil de la commune Sur cette déclaration, l’affaire a été inscrite au rôle général sous le n° 59/71 et appelé à l’audience du vendredi 14 juin 1974 où elle a été utilement retenue ; La requérante a comparu en personne ; elle a sollicité l’entier bénéfice de sa déclaration ; Le ministère public a déclaré s’en remettre à justice ; En cet état la cause présentait à juger les questions de droit suivantes ; POINT DE DROIT Le tribunal devait-il faire droit aux conclusions de la requérante et pour le profil lui accorder l’entier bénéfice de sa déclaration Quid des dépends ? Sur quoi, toutes pièces déposées, monsieur le président, après délibération, a donné sur le siège lecture du jugement ci-après : LE TRIBUNAL Vu les pièces du dossier, Ouï la requérante en ses explications, Le ministère public entendu, Après en avoir délibéré conformément à la loi ; Attendu que par déclaration faite le 15 octobre 1972 devant l’officier de l’état-civil de la commune de Bouaké, la dame DAHOUET née OUFFOUET Monique, désirant bénéficier des dispositions des articles 4 et 5 de la loi n° 64- 361 du 7 octobre 1964 a déclaré prendre comme nom patronymique "HOUPHOUET BOIGNY" qui est celui de son grand-père et qu’à l’avenir s’appellera HOUPHOUET BOIGNY Monique ; |
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Attendu que le procès-verbal de sa déclaration a été transmis au tribunal de dépens pour homologation ; Attendu que la requérante qui a comparu en personne explique qu’elle désire prendre comme nom patronyme HOUPHOUET BOIGNY ; qu’elle désire en outre la rectification de son âge ; Attendu qu’elle soutient être née en 1937 et non 1940 comme cela est indiqué dans son jugement supplétif d’acte de naissance et produit aux débats un certificat médical déterminant son âge physiologique ; Attendu qu’elle demande également la rectification de nom tant pour elle-même que pour son père ; Attendu qu’il apparait ainsi que cette demande comporte deux objets : que d'une part, elle tend à un changement du nom ; que d’autre part, elle vise à la modification de l’âge de la requérante ; Attendu en ce qui concerne le premier point qu’il est justifié par l’arrêt n° 126 du 2 mars 1973 homologuant le nom HOUPHOUET BOIGNY au bénéfice du sieur HOUPHOUET BOIGNY Augustin, frère consanguin de la requérante ; que celle-ci est donc fondée à réclamer pour elle-même le nom HOUPHOUET BOIGNY au lieu de OUFFOUET ; Attendu en ce qui concerne le deuxième point que l’année millésimale de naissance de dame HOUPHOUET BOIGNY Monique est fixée comme étant 1940 sans précision, tandis qu’elle soutient être sans détermination de mois et de date Attendu enfin que la requérante doit supporter les entiers dépens de l’instance ; PAR CES MOTIFS Statuant contradictoirement, en matière civile, en chambre du conseil et en premier ressort ; Ordonne la rectification du OUFFOUET qui sera désormais écrit HOUPHOUET ; Homologue la rectification faite le 15 octobre 1972 devant l’officier de l’état-civil de la commune de Bouaké par la dame DAHOUET, née OUFFOUET Monique en ce sens qu’elle s’appellera HOUPHOUET BOIGNY Monique ; Dit et juge que dame HOUPHOUET BOIGNY Monique est née le 1 er janvier 1937 à Yamoussoukro qu’elle est fille de feu Augustin HOUPHOUET et de feue Amoin GALE ; |
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Ordonne la rectification du jugement supplétif d’acte de naissance n° 571 du 13 novembre 1963 du centre de Toumodi ;
Dit que mention du dispositif du présent jugement sera faite à la diligence de monsieur le procureur de la République près le tribunal de céans, à l'image de l’acte de naissance reçu ;
Fait défense à tous dépositaires de délivrer expédition ou extrait dudit acte d’état-civil sans contenir les mentions ordonnées et ce, sous peine de dommages-intérêts ou de dépens ;
Met les frais à la charge de la requérante ;
Ainsi fait, jugé et prononcé en chambre du conseil par le tribunal de première instance de Bouaké ;
Et ont signé le président et le greffier
SUIVENT LES SIGNATURES
D. F. : 2 000 francs
Enregistré à Bouaké, le 17 juillet 1974
REGISTRE A. C. P. – / 1 9, F 64
N° 1127 Bord. 371/3
RECU : deux mille francs
L’inspecteur
Signé illisible
Pour expédition certifiée,
BOUAKE, le 4 septembre 1974