Côte d’Ivoire / Destruction du centre commercial de Cocody St jean : Les commerçants en colère réclament une enquête
Le Centre Commercial de Cocody St Jean a été détruit dans la nuit du vendredi 15 septembre 2017 sans décision de justice. Une situation qui a fortement ébranlé les commerçants dudit Centre. Dans cet entretien, Diallo Issa, président des commerçants de Cocody, fait le point du préjudice subi et interpelle le gouvernement.
Comment les commerçants victimes de la destruction du Centre commercial de Cocody, s’en sortent-ils ?
Nous vivons depuis le vendredi 15 septembre dans un dénuement total, car nous avons tout perdu. Des fonds de commerce n’existent plus pour certains commerçants. Ces derniers sont obligés de rester à ne rien faire. Quand d’autres ont plus ou moins trouvé quelque chose pour continuer leurs activités. Mais dans l’ensemble, la situation reste préoccupante. Parce que la destruction du centre commercial de Cocody St Jean s’est déroulée dans la nuit vers deux heures du matin. Et nous avons été alertés par les gardiens du site qui ont bien identifié les personnes qui menaient cette opération. Ces personnes étaient appuyées par une unité du groupement mobile d’intervention(GMI) de la préfecture de police d’Abidjan. A notre arrivée sur les lieux vers quatre heures, nous avons constaté que beaucoup de magasins de bijoux, d’œuvres d’art et autres marchandises de valeur ont subi un pillage bien organisé. Devant l’ampleur des dégâts et le pillage orchestré de nos marchandises évalué à près de quatre milliards de francs Cfa, nous nous sommes constitués partie civile en portant plainte contre la Commune de Cocody et consorts devant les juridictions compétentes pour notamment obtenir réparation du préjudice. Cette plainte en question est accompagnée des pièces à conviction (plusieurs constats d’huissier, des vidéos et photos). Nous avons subi d’énormes dégâts, et cette destruction du Centre commercial de Cocody St Jean a engendré des peines pour l’ensemble des familles des commerçants du centre.
Vous n’avez pas votre part de responsabilité dans ce qui vous est arrivé, surtout qu’il semble que vous avez été informés par la mairie d’une éventuelle démolition ?
Nous n’avons pas de pas de responsabilité dans le pillage de nos marchandises. D’autant que notre bailleur, Zeidan Nemer bénéficie d’une convention notariée de concession signée avec la Commune de Cocody. C’est au regard de cette concession que le Tribunal de Première Instance d’Abidjan-Plateau a condamné la Commune de Cocody à la suite des perturbations que le conseil municipal a causées dans le fonctionnement du Centre Commercial de Cocody St Jean appelé communément « marché sénégalais ». C’est la violation de l’esprit et la lettre du contrat de bail notarié conclu les 21 mars et 8 avril 2003 entre notre bailleur Zéidan Nemer, homme d’affaire franco libanais et la Commune de Cocody, par l’actuel conseil municipal qui a permis au juge des référés du Tribunal de Première Instance d’Abidjan Plateau, par ordonnance N° 1116/05/2017 admis qu’en accomplissant des actes de gestion à l’égard des locataires du concessionnaire du Centre, la commune de Cocody commet une voie de fait et l’a ordonné en conséquence de se conformer au contrat de bail résultant de la délibération du Conseil municipal N° 141/MC/SG/2003 du 22 août 2012 en ne s’immisçant pas dans la gestion du Centre commercial sis à Cocody quartier grand marché d’une superficie de 867 m2. Cette ordonnance régulièrement notifiée à la Commune de Cocody le 14 avril 2017, est devenue définitive, celle-ci n’en ayant pas interjeté appel. En dépit de cette ordonnance, la Commune de Cocody nous informe encore par courrier en date du 14 avril 2017 que par une délibération du Conseil municipal du jeudi 30 mars 2017, il a été décidé la destruction imminente de l’immeuble abritant nos commerces en nous invitant à déguerpir des lieux avant le début des travaux de démolition. Lorsque nous avons informé notre bailleur de cette situation, il a saisi à nouveau le Tribunal de Première Instance d’Abidjan-Plateau aux fins d’entendre ordonner à la Commune de Cocody d’avoir à cesser de nous troubler. La décision du Tribunal, aux fins de cessation de troubles, fût notifiée également à la commune de Cocody. Comme la première fois, elle n’a daigné faire appel rendant ladite décision définitive. Puisqu’elle sera frappée d’un certificat de non appel. C’est pourquoi, nous estimons que le Tribunal en déclarant nul et de nul effet la procédure initiée par la Commune de Cocody, a conforté notre bailleur dans ses droits. Cela suppose que la convention de bail notarié conclue par devant Maître Christine Nanou-Adou, notaire, entre la Commune de Cocody et notre bailleur est pleine et entière.
Vous attendez-vous à un dédommagement ?
Nous interpellons l’Etat sur notre situation. Nous demandons l’intervention du gouvernement à travers le ministre du commerce et celui de la justice et des droits de l’Homme pour que les auteurs de cette destruction répondent devant la justice de toutes leurs forfaitures. Nous réclamons une enquête à tous les niveaux pour faire la lumière sur cette affaire conformément au décret 2017-303 du 17 mai 2017 modifiant le décret N°2001-365 du 27 juin portant création du Comité interministériel de suivi et de l’application des Instruments internationaux relatifs aux Droits de l’Homme. Puisque la Côte d’Ivoire, à l’instar des nations membre de l’Organisation des Nations-Unies, entend construire une société égalitaire, où la justice et la liberté préviennent la violence et maintiennent la paix. En effet, le gouvernement ivoirien s’est également engagé dans les réformes législatives afin de poursuivre la modernisation de son système judiciaire pour que force reste à la loi. C’est pourquoi, nous attendons beaucoup de nos autorités dans la protection des biens et des personnes. Toutes ces actions, avec un seul but, construire une Côte d’Ivoire émergente avec toutes ses filles et tous ses fils. Ainsi, la promotion et la protection des droits de l’Homme devraient guider l’action de nos autorités. Nous pensons que c’est à ce prix que tous ensemble, nous parviendrons à construire cette Côte d’Ivoire émergente, où les droits de l’Homme donneront à chaque citoyen les moyens de son total épanouissement.
Entretien réalisé par A.K.