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Depuis des mois en Côte d'Ivoire, le ministère de la Santé multiplie les slogans sur la construction des hôpitaux et la CMU. Malgré cela, les plaintes des patients dans les hôpitaux ne font que se multiplier et les insatisfactions fusent sur les réseaux sociaux... Monsieur le ministre Pierre Demba semble ne pas tirer les vraies leçons donc ne pourra engager de vraies mesures correctives.

Aujourd’hui encore, je propose deux réformes prioritaires et immédiatement réalisables, issues de mon expérience d’urgentiste et qui amélioreront le système de santé et diminueront les plaintes :

1-Gratuité totale des 48 premières heures dans tous les services d’urgence des hôpitaux publics de Côte d’Ivoire

Pourquoi ?

Parce qu’il est inacceptable qu’on demande à un patient inconscient, polytraumatisé ou en détresse vitale de payer avant d’être pris en charge comme c'est le cas dans la majorité des hôpitaux publics de notre pays. Environ 20 % des patients admis aux urgences ne peuvent pas parler ou sont désorientés à leur arrivée.

Exemple de terrain

A mon passage au CHU de Yopougon, l'un de mes plus mauvais souvenir est que j’ai vu un patient victime d’un AVC probablement hémorragique attendre avec ses parents sur un brancard pendant 2 heures, faute d’avoir payé un scanner. Il est décédé sans diagnostic. 

Mesure technique

→ Cette gratuité limiterait 80 % des buzz négatifs sur les réseaux sociaux.

→ Elle concernerait uniquement les soins vitaux de stabilisation, sur 48 heures maximum.

→ Financement possible : réallocation d’une fraction du budget de souveraineté et du Fonds COVID résiduel, estimé à 30 milliards FCFA. Coût prévisionnel de la mesure : environ 12 à 15 milliards FCFA/an, soit 1 % du budget de la santé.

2-Instauration d’une Prime nationale de reconnaissance hospitalière (PNRH) fondée sur la satisfaction des patients et l’évaluation des pratiques professionnelles 

Pourquoi ?

Parce que ceux qui accueillent bien, qui écoutent bien, qui soignent bien doivent être reconnus et récompensés. Aujourd’hui, le salaire ne différencie pas le soignant exemplaire de celui qui insulte ou maltraite les patients.

Objectif

→ Récompenser les meilleurs, et progressivement responsabiliser les autres.

Exemple de terrain

L'année surpassée, une sage-femme du nord a accouché 67 femmes sans aucune perte fœtale en 6 mois, avec zéro plainte. A côté, une autre a reçu 15 plaintes de mauvais traitement sur la même période. Pourtant, elles gagnent le même salaire à la fin du mois. 

Mesure technique

→ Chaque patient évaluera anonymement son parcours de soin via une borne numérique, une fiche ou SMS.

→ Les meilleurs soignants recevront une prime trimestrielle, plafonnée, versée par l’Etat.

→ Une plateforme nationale analysera les tendances pour sanctionner les cas graves de négligence ou proposer des formations correctives.

En résumé

Gratuité des urgences 48 h = sauver des vies + apaiser les familles + désamorcer les colères numériques.

Prime basée sur la reconnaissance réelle des patients = motiver les bons soignants + responsabiliser les mauvais.

Docteur Osman Cherif

Urgentiste. Homme de terrain. Pour une santé plus humaine et plus efficace